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Prise de poste…prise de risque ?

La prise de poste d’un manager ou d’un dirigeant recèle bien des pièges. Cependant, ces pièges sont bien souvent mis en place par la personne elle-même plus que par son environnement.

Chaque décision de promotion, de remplacement, de création de poste, porte des interrogations et des ambitions fortes.
Cependant, l’accompagnement régulier de dirigeants fait ressortir un certain nombre de comportements récurrents qui, sans être exhaustifs, permettent de tirer quelques conclusions voire quelques pistes de réflexions pour les cadres dans cette situation.

Voici quatre attitudes que l’on peut retrouver assez régulièrement et pour lesquelles une prise de recul s’impose afin de faire les bon choix. Quand on parle de choix, il ne s’agit pas de conseils mais de choix qui devront correspondre à l’ambition partagée du manager et de la structure concernée. Donc pas de solutions toutes faites mais des pistes de réflexion.

Quatre situations récurrentes :

  • Le sentiment d’imposture
  • Le retour à la zone de confort
  • Le deuil de l’équipe
  • Le choix des bons objectifs

Le sentiment d’imposture

Le sentiment d’imposture se manifeste souvent lorsque le manager reçoit une promotion qu’il ou elle n’attendait pas ou encore qu’il n’osait pas espérer !
Cette impression de ne pas être vraiment à la bonne place, de ne pas avoir les bonnes compétences ou pas encore., de ne pas avoir « déjà fait cela » avant.
Il est d’autant plus prégnant que la personne prend du grade au sein du même département ou service de l’entreprise. Plus encore lorsque le/la manager remplace une personne estimée par l’équipe voire qui l’a formée.
Le manager navigue donc souvent entre l’envie de suivre ses intuitions ou celle de faire « comme la personne d’avant » tout en sentant que son style est différent et que cela ne conviendra pas nécessairement.
Autre difficulté. Le manager hésitera à aller demander un avis voir de l’aide : « on me fait confiance pour le poste, si je demande de l’aide je montre à tout le monde que je suis un/e imposteur ! ».

Il n’y a pas de solution toute faite pour remédier à cette « auto-flagellation ». Cependant il est bon de garder à l’esprit qu’on peut soit nommer une personne parce qu’elle est totalement prête. Soit parce qu’elle représente un potentiel pour le poste. En clair si elle est totalement prête, l’entreprise la nomme peut être un peu trop tard !
On n’offre pas un vélo à un enfant quand il sait déjà en faire ! C’est en pédalant, en tâtonnant et en perdant l’équilibre qu’il devient habile. En conséquence c’est en prenant des fonctions un peu hors de sa zone de confort qu’on se forme et qu’on grandit !

Le retour à la zone de confort

La zone de confort est le cadre professionnel et relationnel dans lequel le/la manager récemment nommé(e) excelle à ce jour. En tout cas, la zone dans laquelle le travail est totalement maîtrisé, facile et rapide pour l’individu.
Pour faire simple, lors d’une promotion, le manager occupe en général parfaitement son poste…précédent !
Le problème est que si la prise de poste ne rencontre pas rapidement le succès, le manager à tendance à retourner très vite dans cette zone de confort à savoir occuper son poste antérieur, au grand dam de son équipe et de la personne qui l’a remplacée.
C’est notamment le cas des grands techniciens ou experts qui prennent la direction d’une équipe, ou d’une structure complète.
Bien souvent un ex directeur financier va avoir tendance à se focaliser sur la finance voire à contrôler son subalterne quitte à « micro-manager » celui-ci et à oublier ses nouvelles attributions.
A mesure que la pression augmente si le challenge est fort et l’environnement difficile notre manager va de plus en plus retourner dans cette zone de confort et rater la cible de son nouveau poste.

Il est donc essentiel pour le manager de justement bien connaître cette zone et son expertise et faire de son envie de « retourner » à celle-ci son alerte, son effet de levier pour grandir dans ses nouvelles fonctions. C’est paradoxalement en osant le risque d’échec ou de manque d’efficacité de son remplaçant qu’il va lui même grandir et prendre une posture de chef d’orchestre, essentielle à l’atteinte de ses objectifs.

Le deuil de l’équipe

L’autre écueil réside dans le remplacement d’une personne estimée. Et d’autant plus si les conditions d’exercice du métier sont difficiles lors de la prise de poste. L’équipe peut avoir soit un sentiment d’abandon, soit pour certain un sentiment d’injustice. « pourquoi ne m’ont-ils pas choisi ? »
Cela peut être renforcé par des « baronnies » existantes dans l’entreprise et que justement un baron est parti ou a été écarté par la direction.

Ici aussi pas de solution toute faite mais une courbe de deuil classique à suivre pour l équipe qui peut bien entendu recéler de la colère par instants. Pour la personne qui prend son poste il s’agit de marquer son style management, son territoire, et poser des objectifs clairs de collaboration. C’est aussi prendre en compte ce deuil et le reconnaître et donc le communiquer au besoin à l’équipe. Car c’est avec elle que le manager pourra remplir sa mission, pas contre eux. Sauf à avoir les mains libres pour reconstruire avec des « hommes à soi » mais c’est rare !

Le choix des bons objectifs

La promotion d’une personne ne suit pas nécessairement un cadre très précis. Et certaines prises de postes sont chaotiques car résultant d’événements accidentels ou mal préparés. Malgré la fiche de mission éventuelle (plus ou moins précise d’ailleurs) que le manager aura peut être du mal à challenger (voir plus haut le sentiment d’imposture) le chemin reste parfois flou.
Le risque est grand d’être un bon soldat et de foncer tête baissée sur l’atteinte de résultats qui semblent essentiels. Cependant, sans vraie confrontation des objectifs et des demandes, le manager risque de tirer sur la mauvaise cible ! Ou encore de décider de changements de moyen/ long-terme alors qu’il doit d’avoir des succès rapides pour solidifier sa prise de poste.
On est donc dans une logique d’équation avec un grand nombre de paramètres !
Satisfaire la direction et leur permettre de valider la prise de poste
Engager l’équipe dans la voie du succès
Trouver et construire son style dans ses nouvelles fonctions.

Il faut donc construire des plans d’actions sur plusieurs horizons sans quoi l’absence de succès à court terme risque d’obérer les chances de voir les résultats du « grand plan à 2 ans »…

En conclusion une prise de poste est très systémique, elle engage l’entreprise à des niveaux très divers. Mais c’est justement la qualité de ces interfaces entre les personnes qui contribue au succès.
Le succès d’un manager est donc celui de toute l’entreprise. De même, l’échec éventuel est donc l’affaire de tous et pas de la personne elle même !